Les aménagements des lois de finances 2021 impliquent, entre autres, la mise à jour de la définition de la sous-traitance des organismes de recherche et intègrent d’importantes modifications dans sa prise en compte.
Nature des dépenses de prestation éligibles
Deux types de relation contractuelle entre le donneur d’ordre et le tiers sont définis : d’un côté la recherche contractuelle ou collaborative et de l’autre la prestation de service. La notion d’incertitude technique y est soulignée avec la mise en parallèle de « l’obligation de moyen » et « l’obligation de résultat », cette dernière ne relevant pas de la R&D.
Cette nouvelle vision de la sous-traitance de travaux de recherche s’inscrit en cohérence avec la nouvelle définition des opérations de R&D disponibles dans le CGI. Celle-ci s’inscrit pleinement dans la définition du manuel de Frascati et ses 5 critères d’éligibilité, dont celui d’incertitude.
Le BOI apporte également deux précisions issues de jurisprudences sur la nature des activités sous-traitées valorisables.
La première est issue d’une jurisprudence qui considère éligible les dépenses relatives à des travaux techniques et scientifiques externalisées à des organismes ou experts agréés ne relevant pas d’opérations de R&D si et seulement si ces travaux sont indispensables à la bonne conduite d’une opération de R&D interne pour le donneur d’ordre.
La deuxième quant à elle concerne les organismes de recherche agréés qui doivent exclure du calcul de l’assiette éligible de leur propre CIR les dépenses réalisées pour le compte de tiers, et non les sommes encaissées dans le cadre de ces recherches sur contrat.
Agrément des prestataires
Plusieurs éléments concernant les agréments de prestataires ont également été modifiés.
On remarque premièrement qu’un passage important de la précédente version du BOI est supprimé. Celui-ci stipulait que, contrairement aux organismes ou experts privés, ceux de droit public ne nécessitaient pas d’agrément. Cela implique que désormais, à partir du 1er janvier 2022, toutes les dépenses externalisées de R&D devront être confiées à des experts ou organismes agréés sans distinction de leur caractère privé ou public.
De plus, des précisions sont ajoutées sur la manière de demander un agrément CII ou CIR. Cet ajout vient restreindre la capacité des organismes à prétendre à cet agrément en stipulant que « l’organisme ou l’expert » voulant obtenir un agrément, doit montrer qu’il est capable d’entreprendre des travaux de recherche scientifique et technique d’après une démarche qu’il a lui-même identifié.
« Cette condition vise à assurer aux entreprises qui ont recours à l’externalisation de leurs travaux de recherche la pertinence et la qualité des résultats obtenus, grâce au respect de la démarche scientifique propre à la recherche. ».
Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2022 de nombreuses mesures seront mises en place :
- Fin du doublement des dépenses de R&D pour les opérations confiées à des organismes de recherche publics agréés ;
- Abaissement du plafond de dépenses confiées à des organismes de recherche publics à 10 M€ au lieu de 12 M€ ;
- Nécessité pour tous les organismes de recherche publics, privés et experts d’avoir un agrément CIR pour voir les dépenses d’opérations de recherche qui leurs sont confiées être éligibles au CIR.
Limitation de la prestation en cascade
Autre précision importante de cette nouvelle version du BOI : la limitation de la sous-traitance en cascade. Celle-ci devient possible si et seulement si un organisme ou expert de second rang est lui-même agréé. Cependant, si ces organismes de second rang sous-traitent une part des travaux, ces dépenses afférentes ne seront pas éligibles. Cette disposition impacte aussi, jusqu’au 31 décembre 202, les dépenses de R&D confiées à des organismes publics comptant pour le double de leur valeur. En effet seule la quote-part des dépenses réalisées par des organismes publics (sous-traitant de premier rang, ou sous-traitant de second rang) sont prises en compte pour le double de leur valeur.
Cas des sociétés agrées
Dans le prolongement d’une autre décision du Conseil d’État (CE 9-9-2020 – 440523), l’administration précise que les organismes qui réalisent des opérations de recherche pour le compte de tiers doivent exclure de la base de calcul de leur propre CIR les dépenses éligibles exposées pour la réalisation de ces opérations, et non déduire les sommes reçues du donneur d’ordre.
Conclusions
Concernant la valorisation des dépenses externalisées, la position de l’administration fiscale se rapproche de celle du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) : l’inéligibilité des dépenses de prestation en régie et ajout des notions d’obligation et de résultats.
Par ailleurs, l’obligation d’agrément pour les prestataires publics à partir du 1er janvier 2022 expose les donneurs d’ordre au risque de voir une partie de leurs prestataires publics ne pas procéder aux demandes d’agrément (sujet totalement nouveau pour eux). Cette mesure peut sembler contradictoire avec la volonté du Gouvernement de favoriser la collaboration public/privé au travers d’autres annonces.
Des précisions sont attendues concernant les modalités de dépôt des demandes d’agrément, notamment sur la nécessité de présenter ou non une opération de R&D pour justifier de la capacité de l’organisme public à conduire des projets de recherche.