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Loi de finances 2021 : quels impacts sur le CIR/CII ?

Le crédit d’impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt innovation (CII) ont été significativement impactés par les lois de finances de 2020 et 2021. Tous les aménagements sont répertoriés par l’administration dans une mise à jour de sa base Bofip du 13 juillet 2021.

Activités, taux, dépenses éligibles,… Quels sont les principaux aménagements du CIR/CII implémentés par les dernières lois de finances ?

 

Activités éligibles

La définition des activités de recherche et développement éligibles au CIR a été clarifiée par les nouvelles lois finances sur la base de la septième version du Manuel de Frascati de 2015. Si vous souhaitez en savoir plus, on vous a préparé un article entièrement dédié à ce sujet ici.
Voici les principales informations à retenir :

  • Les trois types d’activités de recherche (fondamentale, appliquée et développement expérimental) doivent désormais comporter cumulativement : un élément de nouveauté, de créativité, d’incertitude, être systématiques ainsi que transférables et/ou reproductibles (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 n°1).
  • La définition des activités de développement expérimental est également complétée et la notion d’état des techniques préexistantes est précisée (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 n°70).
  • Enfin, l’administration décrit une nouvelle démarche d’identification des activités de recherche et développement (BOI-BIC-RICI-10-10-10-25 n°60).

Modalités de calcul

Quelques mises à jour ont également été apportées au calcul du montant des crédits impôts, notamment par rapport aux dépenses éligibles et au calcul du taux applicable.

Les dépenses éligibles :

  • La modification des lois finance amène désormais la possibilité d’intégrer des dépenses relatives à des activités techniques et scientifiques ne relevant pas d’opération de R&D sous-traitées à des organismes ou experts agréés dans la mesure où ces dernières sont indispensables à la réalisation d’opérations de R&D interne d’après l’arrêt FNAMS (CE 22-7-2020 n°428127) ;
  • Suite à une décision du Conseil d’Etat, la CET est à présent considérée comme cotisation sociale obligatoire (CE 19-5-2021 n°432370) ;
  • A noter également, la possibilité de prise en compte des dépenses de personnel relatives à des intérimaires, à condition qu’ils soient des personnels de recherche entièrement et directement affectés à des opérations de R&D (BOI-BIC-RICI-10-10-20-20 n°80).

Révision des taux :

  • Les frais de fonctionnement sont maintenant fixés à 43% des frais de personnel hors jeune docteur (Loi de Finances 2020) ;
  • Concernant les dépenses exposées en Corse : pas de taux majorés pour le CIR. Pour le CII, le taux est majoré à 35% pour les moyennes entreprises et à 40% pour les petites entreprises ;
  • Autre nouveauté, la déduction des Prêts à Taux Zéro pour l’Innovation (PTZI) de l’assiette de dépenses éligibles car ils sont considérés comme une subvention publique (BOI-BIC-RICI-10-10-30-20 n°25).

Prestations privées et publiques

L’impact de cette mise à jour touche également à la définition des activités de sous-traitance et aux modalités d’agréments des prestataires. Vous trouverez toutes les infos à ce sujet dans notre article dédié ici.
Les 3 informations clés à retenir :

  • Tous les organismes de recherche publics comme privés devront avoir un agrément CIR pour que les dépenses émises à partir du 1er janvier 2022, relatives à des opérations de R&D qui leur sont confiées soient éligibles. Les auteurs de demandes d’agréments devront justifier via la réalisation d’un dossier technique de leur capacité à réaliser des travaux de recherche sur la base d’une démarche scientifique pensée en interne (BOI-BIC-RICI-10-10-20-30 n°15) ;
  • Sous-traitance en cascade : possibilité de compter les dépenses sous-traitées à un sous-traitant de second rang si ce dernier dispose d’un agrément (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 n°175) ;
  • L’administration distingue désormais deux types de recherche externalisée, celle confiée entièrement à un organisme de recherche et celle menée dans le cadre d’une collaboration (BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 n°171).

Statut de PME

La définition du statut de PME a elle aussi été modifiée par les nouveaux aménagements du CIR : une entreprise devenant officiellement une PME si elle valide ce statut sur deux exercices de suite. De même, elle perdra ce statut dès lors qu’elle ne validera plus ce statut deux exercices de suite. Il est précisé que cette condition s’appliquera également dans les cas d’entrée ou de sortie d’un groupe (BOI-BIC-RICI-10-10-50 n°140).

Sociétés agréées déclarant du CIR

Enfin, les entreprises réalisant des opérations de sous-traitance éligibles au CIR ou au CII, ne devront désormais prendre en compte pour leur propre calcul que les opérations éligibles réalisées dans les projets internes sans autre déduction à effectuer (arrêt TAKIMA CE 9-9-2020 n°440523).

 

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Evolution de la définition des activités de R&D éligibles au CIR

Depuis 2012, le Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP) constitue le support de diffusion dématérialisé de l’ensemble de la doctrine fiscale opposable par le contribuable à l’administration.

A travers la mise à jour le 13 juillet 2021 des Bulletins Officiels des Impôts (BOI) régissant le Crédit Impôt Recherche (CIR) et le Crédit Impôt Innovation (CII), l’Administration fiscale a procédé à de nombreuses modifications de sa doctrine impactant le CIR/CII. Celles-ci concernent notamment l’intégration des définitions de la recherche et du développement expérimental du Manuel de Frascati.

La définition de la R&D éligible au CIR

Dans la nouvelle version du BOI, les définitions des trois catégories de R&D sont toujours présentes, mais elles ont été complétées pour la recherche fondamentale et le développement expérimental.

Les changements majeurs relèvent notamment de l’ajout des 5 critères d’éligibilité d’une opération pour qu’elle soit qualifiée d’opération de R&D. A ce titre elle doit :

  • Comporter un élément de nouveauté ;
  • Comporter un élément de créativité ;
  • Comporter un élément d’incertitude ;
  • Être systématique ;
  • Être transférable et/ou reproductible

Ces critères cumulatifs, viennent délimiter le périmètre de définition des activités de R&D en le rendant plus contraint, plus restrictif. De plus, de nouvelles précisions sont proposées pour les différents types d’activités de R&D, et de nombreux exemples issus du Manuel de Frascati sont fournis. On note que le flou sur la distinction entre recherche fondamentale orientée et pure est levé :

« Dans le cadre du CIR, il n’est pas procédé à une distinction, entre la « recherche fondamentale orientée » et la « recherche fondamentale pure », toutes deux étant éligibles (en référence au Manuel de Frascati, § 2.28). »

Même si la recherche appliquée quant à elle ne voit pas sa définition changer, une importante mise à jour sur la définition du développement expérimental est apportée. Il est désormais défini comme une partie du développement produit au sein d’une entreprise. La présence d’un chercheur pour réaliser cette opération de R&D est requise, et elle s’arrête au moment où l’un des cinq critères du Manuel de Frascati n’est plus respectée. (Manuel de Frascati, § 2.34 et § 7.47)

Précisions sur l’état de l’art

Concernant l’état des connaissances, la méthode de constitution de ce dernier, par un travail bibliographique est détaillée ainsi :

« Il s’agit ici de réaliser une recherche bibliographique (articles de journaux, de revues, actes de conférences scientifiques et/ou techniques, livres, livres blancs, mémoires de thèse, rapports de recherche externes à l’entreprise, brevets et bases de données techniques, etc.) ainsi qu’une analyse détaillée des approches théoriques ou pratiques existantes. Si le problème posé n’a pas trouvé de solution, alors il s’agit d’un verrou scientifique nécessitant l’engagement d’une opération de R&D. »

Le texte s’appuie également sur le Manuel de Frascati pour distinguer la démarche d’une opération de R&D d’une activité d’ingénierie utilisant l’état des connaissances constitué.

« En revanche, lorsqu’une ou plusieurs solutions identifiées dans l’état des connaissances accessibles, permettent de contourner le verrou scientifique, les travaux ainsi entrepris sont qualifiés d’ingénierie. Ils ne relèvent donc pas de la R&D et ne sont pas éligibles au CIR. »

D’autant plus que les activités « connexes » à la R&D et les activités d’innovation ne sont plus présentées dans ce BOI, et en ont désormais un qui leur est dédié : BOI-BIC-RICI-10-10-10-25.

Démarche d’identification

La démarche d’identification des activités de R&D auparavant présentée comme s’appuyant sur le critère de dissipation des incertitudes techniques non résolues par l’état de l’art a été remplacée par le schéma du Guide CIR introduisant la notion d’opération de R&D.

Dans le BOI-BIC-RICI-10-10-10-25 « Le processus permettant l’identification des activités de R&D » est représenté par le schéma issu du Manuel de Frascati.

Ainsi, le schéma ci-dessous est un exemple de la manière dont les opérations de R&D peuvent s’inscrire dans le développement d’un nouveau produit.

Schéma identification des démarches de R&D

 

La publication d’une nouvelle version du BOFiP était très attendue car elle fait converger la doctrine fiscale en matière d’éligibilité avec la position du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) alignée sur le manuel de Frascati depuis 2018 au travers de la publication du guide CIR. Cette cohérence de position sur la définition de la R&D éligible au CIR apporte la clarté nécessaire aux contribuables en cas de contrôle fiscal.

 

R&D : nouveautés sur la notion de sous-traitance

 

Les aménagements des lois de finances 2021 impliquent, entre autres, la mise à jour de la définition de la sous-traitance des organismes de recherche et intègrent d’importantes modifications dans sa prise en compte.

Nature des dépenses de prestation éligibles

Deux types de relation contractuelle entre le donneur d’ordre et le tiers sont définis : d’un côté la recherche contractuelle ou collaborative et de l’autre la prestation de service. La notion d’incertitude technique y est soulignée avec la mise en parallèle de « l’obligation de moyen » et « l’obligation de résultat », cette dernière ne relevant pas de la R&D.

Types de relation contractuelle entre le donneur d’ordre et le tiers

Cette nouvelle vision de la sous-traitance de travaux de recherche s’inscrit en cohérence avec la nouvelle définition des opérations de R&D disponibles dans le CGI. Celle-ci s’inscrit pleinement dans la définition du manuel de Frascati et ses 5 critères d’éligibilité, dont celui d’incertitude.

Le BOI apporte également deux précisions issues de jurisprudences sur la nature des activités sous-traitées valorisables.

La première est issue d’une jurisprudence qui considère éligible les dépenses relatives à des travaux techniques et scientifiques externalisées à des organismes ou experts agréés ne relevant pas d’opérations de R&D si et seulement si ces travaux sont indispensables à la bonne conduite d’une opération de R&D interne pour le donneur d’ordre.

La deuxième quant à elle concerne les organismes de recherche agréés qui doivent exclure du calcul de l’assiette éligible de leur propre CIR les dépenses réalisées pour le compte de tiers, et non les sommes encaissées dans le cadre de ces recherches sur contrat.

Agrément des prestataires

Plusieurs éléments concernant les agréments de prestataires ont également été modifiés.

On remarque premièrement qu’un passage important de la précédente version du BOI est supprimé. Celui-ci stipulait que, contrairement aux organismes ou experts privés, ceux de droit public ne nécessitaient pas d’agrément. Cela implique que désormais, à partir du 1er janvier 2022, toutes les dépenses externalisées de R&D devront être confiées à des experts ou organismes agréés sans distinction de leur caractère privé ou public.

De plus, des précisions sont ajoutées sur la manière de demander un agrément CII ou CIR. Cet ajout vient restreindre la capacité des organismes à prétendre à cet agrément en stipulant que « l’organisme ou l’expert » voulant obtenir un agrément, doit montrer qu’il est capable d’entreprendre des travaux de recherche scientifique et technique d’après une démarche qu’il a lui-même identifié.

« Cette condition vise à assurer aux entreprises qui ont recours à l’externalisation de leurs travaux de recherche la pertinence et la qualité des résultats obtenus, grâce au respect de la démarche scientifique propre à la recherche. ».

Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2022 de nombreuses mesures seront mises en place :

  • Fin du doublement des dépenses de R&D pour les opérations confiées à des organismes de recherche publics agréés ;
  • Abaissement du plafond de dépenses confiées à des organismes de recherche publics à 10 M€ au lieu de 12 M€ ;
  • Nécessité pour tous les organismes de recherche publics, privés et experts d’avoir un agrément CIR pour voir les dépenses d’opérations de recherche qui leurs sont confiées être éligibles au CIR.

 Limitation de la prestation en cascade

Autre précision importante de cette nouvelle version du BOI : la limitation de la sous-traitance en cascade. Celle-ci devient possible si et seulement si un organisme ou expert de second rang est lui-même agréé. Cependant, si ces organismes de second rang sous-traitent une part des travaux, ces dépenses afférentes ne seront pas éligibles. Cette disposition impacte aussi, jusqu’au 31 décembre 202, les dépenses de R&D confiées à des organismes publics comptant pour le double de leur valeur. En effet seule la quote-part des dépenses réalisées par des organismes publics (sous-traitant de premier rang, ou sous-traitant de second rang) sont prises en compte pour le double de leur valeur.

Cas des sociétés agrées

Dans le prolongement d’une autre décision du Conseil d’État (CE 9-9-2020 – 440523), l’administration précise que les organismes qui réalisent des opérations de recherche pour le compte de tiers doivent exclure de la base de calcul de leur propre CIR les dépenses éligibles exposées pour la réalisation de ces opérations, et non déduire les sommes reçues du donneur d’ordre.

 

Conclusions

Concernant la valorisation des dépenses externalisées, la position de l’administration fiscale se rapproche de celle du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) : l’inéligibilité des dépenses de prestation en régie et ajout des notions d’obligation et de résultats.

Par ailleurs, l’obligation d’agrément pour les prestataires publics à partir du 1er janvier 2022 expose les donneurs d’ordre au risque de voir une partie de leurs prestataires publics ne pas procéder aux demandes d’agrément (sujet totalement nouveau pour eux). Cette mesure peut sembler contradictoire avec la volonté du Gouvernement de favoriser la collaboration public/privé au travers d’autres annonces.

Des précisions sont attendues concernant les modalités de dépôt des demandes d’agrément, notamment sur la nécessité de présenter ou non une opération de R&D pour justifier de la capacité de l’organisme public à conduire des projets de recherche.

 

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